Sur un tapis, une belle endormie

ft. Alan Hunt

Peu à peu, Syragane prenait ses repères, même si ça restait très compliqué, n’était-ce que tout ce qu’ils appelaient « technologie » , c’était quelque chose qui la dépassait complètement, à commencer par cette « tablette » dont Jane était inséparable ! Au départ, elle avait cru à des tours de magie, très, très surprenants avant de comprendre qu’il n’en était rien….même s’il lui avait fallu du temps pour comprendre l’invention. Aujourd’hui, Jane l’aidait à apprendre ce monde, à traduire ses mots dans sa langue à elle, et Syragane tâchait de tout mémoriser. C’était plus facile d’apprendre une nouvelle langue que de s’habituer à tout ça, tout ce bruit, comme la musique, la musique qui sortait toujours de partout, de ces boîtes, tout le temps, ici une chanson, ici une autre et des rythmes si ….surprenants.  

Mais le point positif dans tout ça, parce que Syragane essayait toujours d’envisager le bon côté des choses, elle avait un refuge, un de ces endroits qu’ils nommaient Mobil-home, ils l’y avaient installée dès le premier jour, enfin ce jour où ils l’avaient surprise à dormir sur un « tapis ». C’était un sacré gros tapis !  Mais sans se décourager un seul instant, Syragane observait, écoutait et faisait ce qu’on lui demandait, en espérant que bientôt Ishtar la guiderait à nouveau.

Aujourd’hui, elle profitait d’un temps qui devenait enfin un peu plus doux pour se promener dans le parc, affublée de ces vêtements qu’on avait trouvés pour elle, des vêtements de saltimbanque, mais Jane disait que ça lui allait très bien. Et puis Syragane avait refusé catégoriquement de porter ce qu’ils appelaient « pantalon », non ! c’était impossible. Alors elle portait de longues robes, ou des jupes comme aujourd’hui dans un camaïeux de verts et de bleus, un vêtement avec des manches longues et ce « manteau » long lui aussi avec le col doublé. Sans oublier les bottes ! Encore une sacrée découverte pour Syragane qui avait bien fait rire ses nouveaux amis en faisant ses premiers pas sur des talons, mais sa grâce naturelle avait rapidement repris le dessus. Ses cheveux qu’elle avait enfin pu laver depuis sa mésaventure, et dont elle pouvait à nouveau prendre grand soin, lui descendaient très bas dans le dos, accrochant les reflets du soleil et Syragane paraissait un peu plus à son aise.

Parfois, elle croisait le regard de cet homme, Samuel qui la surveillait. Elle sentait régulièrement son regard d’aigle sur elle. Syragane devinait qu’il ne lui faisait pas confiance, mais il préférait vraissemblablement l’observer plutôt que l’interroger. Du reste, elle ne lui avait plus guère « parlé » depuis cette étrange journée. Avec Jane par contre c’était une toute autre histoire. Si la jeune femme se montrait des plus charmantes, elle parlait énormément et ce débit rapide, dans une langue inconnue, ce n’était pas simple à suivre.

Mais bon, elle se montrait si adorable que Syragane n’aurait pu lui en tenir rigueur. Et puis ça lui faisait du bien d’avoir de la compagnie féminine lui rappelant un temps pas si lointain pour elle, où elle passait des journées entières à profiter des jardins en compagnie des autres prêtresses et vierges d’Ishtar. Bien qu’elle préférait éviter de trop y penser pour ne pas sombrer dans la mélancolie.

Pour le moment, elle observait, avançant lentement au milieu des badauds, tous ces gens venus profiter du parc, son regard un instant attiré par un visage familier. Syragane se tendit pour tenter de le revoir alors qu’il disparaissait. Alors quand elle fut certaine, elle courut pour le rejoindre en quelques pas, appelant son nom :

- Alan ?? Alan !

Elle arriva à son niveau, tout sourire et se laissa aller par son élan en prenant sa main libre qu’elle serra des deux siennes, le regard brillant.

- Je suis contente de vous revoir !!! Je voulais vous remercier pour tout ce que vous avez fait pour moi, mais…

Elle inspira profondément en haussant les épaules. Il y avait tant à dire ! Au lieu de quoi, elle reporta son attention sur la fillette et lui sourit à elle aussi.

- Bonjour Oniera !

Sa main courut pour lui offrir une douce caresse sur sa joue rebondie. Mais son regard revint à Alan.

- Vous êtes venu vous amuser ?

Sur un tapis, une belle endormie

ft. Alan Hunt

Elle lui répondit par un sourire. Ca elle pouvait bien comprendre. Ou pouvait-on bien s’attendre à la trouver si ce n’était chez elle, dans les appartements de la grande prêtresse ? Sauf que tout ça n’existait sans doute plus ! Alors elle était revenue dans cet endroit, celui au plus proche de la porte de Namur, et avait trouvé un accueil chaleureux en attendant de savoir ce qu’elle allait devenir.

Elle était donc doublement ravie de voir un visage familier, enfin deux en comptant la petite fillette. Alan confirma qu’ils étaient venus profiter du parc puisque c’était son but absolu, amuser les gens. Jane lui en avait longuement expliqué l’utilité, enfin à sa façon, à grand renfort de traduction « google », et de geste.

Avec Alan, c’était plus facile, puisqu’ils parlaient tous les deux l’arabe, même si le sien remontait à des temps ancestraux et que celui d’Alan manquait peut-être de pratique, c’était amplement suffisant pour se comprendre. Alan qui lui fit part de sa surprise. Et quand il lui demanda si elle était un rêve, Syragane surprise, finit par éclater de rire, ce n’était pas un rire moqueur loin de là, mais un rire ravi.

- Voilà une bien jolie façon de me nommer !

Le regard de Syragane pétillait, même s’il était logique pour Alan de croire qu’elle n’était qu’un rêve au vu de ce qui s’était passé quand ils s’étaient vus. Alors elle mêla ses doigts aux siens, jouant un peu avec eux, baissant un instant son regard sur eux, avant de lever les yeux à nouveau vers lui.

- On ne peut toucher les rêves, ni les mirages, dit-elle avec un beau sourire. Je suis bien réelle, même si je vous dois une explication pour ce qui s’est passé chez vous. ajouta-t-elle en prenant soin de bien articuler pour qu'il puisse la comprendre.

Syragane regarda autour d’eux, il y avait foule en ce jour et elle ne tenait pas à ce qu’on puisse l’entendre parler de tout ça à Alan.

- Si vous voulez bien, nous pouvons marcher un peu. On peut aller voir les chevaux, votre petite étoile appréciera peut-être ? Et je vous raconterai…. Une histoire qui risque un peu de vous surprendre je le crains.

Elle le guida donc à l’écart vers les parcs à chevaux pour le moment fermé au public et c’était parfait.  Les animaux, de superbes bêtes à la robe noire pour l’un d’eux et blanche pour les quatre autres, étaient superbes.

- Je suis si navrée pour ma façon de… comment devait-elle dire ça ? d’être partie la dernière fois, résuma-t-elle. Je n’ai encore aucun contrôle sur ce phénomène pour le moment. Mais je crois que c’est lié au fait que je ne suis pas de ce « Kan ».  

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ft. Alan Hunt

Ce fut au tour de Syragane d’être perplexe :

- Là où vous aller ?

Cela devait avoir un rapport avec Sîn, puisqu’il le servait. La dernière fois, il n’avait su lui expliquer son rôle, il lui avait seulement dit qu’il était un rêveur.

- Est-ce que vous parlez du monde souterrain ?

Elle le dévisagea avec un mélange de curiosité et de crainte, celle de comprendre le véritable sens qu’il pouvait donner à ce mot. Sîn était puissant, père d’Isthar et de Shamash*, il rendait justice en ce monde et celui d’en bas. Puis elle soupira en secouant la tête. Ou il n’était qu’un prêtre comme elle. Toutefois, n’avait-il pas nommé sa fille « Nanna » qui était la traduction en Sumérien de Sîn ?  Par quel étrange hasard son chemin avait-il été mené à croiser celui d’Alan, serviteur de Sîn ? Mais était-ce bien un hasard ? Difficile à y croire quand on avait voué sa vie à Ishtar. Pourtant celle-ci ne lui avait nullement parlé d’Alan, elle avait juste fini par lui dire qu’elle pouvait lui faire confiance, à croire que la déesse n’en savait pas plus qu’elle au sujet du « rêveur ». Et il y avait un autre détail qui avait toute son importance, plus de deux millénaires séparaient leur kan.

Aussi ne fut-elle pas surprise qu’il relevât le mot. Elle tenta donc d’expliquer, de la façon dont Ishtar le lui avait expliqué, le tout en l’accompagnant de geste, habitude acquise avec les houdinis:

- Le monde n’est pas un seul monde tel que nous le voyons, il est composé de plusieurs mondes, ou quartiers comme la lune, mais Namur, le temps, permet qu’ils puissent être visités en traversant les portes des Kans, des mondes qui sont différents pourtant les mêmes, mais pas le même moment, pas le même Temps. Je viens d’un Kan, où Babylone fait encore montre de toute sa splendeur, ….enfin je n’en suis plus si sûre. Quand j’ai quitté mon Kan, à cause de Kufus, j’ai laissé derrière moi, ….

Syragane s’interrompit, bouleversée. Elle avait réussi à surmonter cette épreuve, mais en parler, restait très douloureux.

- Une Babylone assiégée par les Nergalii, les serviteurs et disciples de Nergal, le monde des morts. Ils ont…assassiné toutes mes sœurs, mes mères, mes filles ! Ils m’ont enfermée avec elles dans le temple d’Ishtar, puis ils ont condamné, fermé toutes les portes. Je croyais que j’allais mourir dans ce tombeau, au milieu des corps de celles que j’aimais tant. Alors…

Son regard brilla avec plus d’intensité, noyé de larmes et Syragane poursuivit avec cette passion qui la caractérisait :

- J’ai prié Isthar, longtemps, très longtemps. Et elle m’a entendue. Elle est venue à moi, et m’a offert les dons d’Enlil* ! Le vent….et l’air qui soulève le sable et forge le monde, murmura-t-elle. C’était étrange, je me suis un peu perdue, je n’étais plus Syragane mais j’étais le vent, et puis Ishtar m’a guidée. Il fallait que j’aille  à la Zigurat, là où le grand prêtre nergalii Kufus, allait ouvrir la porte pour trouver la clef pour faire revenir Nergal d’entre les  morts. Quand je l’ai vu…..la porte était déjà ouverte, si brillante qu’elle en était aveuglante. J’ai eu peur d’arriver trop tard, alors….Je me suis précipitée pour livrer combat, j’ai attaqué Kufus, mais je n’avais aucune chance face à un tel adversaire. Il m’a repoussée, me faisant franchir malgré moi la porte de Namur……Et quand je me suis réveillée, j’étais ici, dans cette tente là-bas, j’étais redevenue le vent et….. et l’autre soir quand vous m’avez trouvée, j’étais redevenue Syragane. Les pouvoirs d’Enlil sont grands mais difficiles à comprendre et plus encore à maîtriser.

Et Syragane se tut, avant de se tourner vers Alan. Allait-il la prendre pour une folle ? Elle en doutait. Il avait assisté à …..comment devait-elle dire ça ? Sa transformation ? Et s’il croyait en Nîn, il ne pouvait que comprendre ce qu’était Enlil.

*Enlil dieu de toute chose, et dieu du vent.
*Shamash, dieu de l'astre solaire.

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ft. Alan Hunt

Nocte. Syragane ne reconnut pas le nom, Nocte, mais ce devait sans doute correspondre dans la langue d’Alan au monde de Sîn. Elle hocha la tête, prenant note de sa réponse, puis elle lui sourit, posant sa main par-dessus la sienne, reconnaissante de son geste qui se voulait consolateur. Et Alan lui proposa à nouveau son aide, ce dont elle lui fut, une fois de plus reconnaissante. Il était décidément adorable.

- C’est très gentil à vous Alan, merci, je m’en rappellerai, si jamais je …. Et bien si je devais à nouveau me retrouver plongée dans la « mer » dit-elle en anglais cette fois. Et avec un sourire amusé.

Mais alors il précisa que lui-non plus ne maîtrisait pas sa magie. Syragane ouvrit de grands yeux étonnés.

- Alors Sîn vous a aussi doté de pouvoirs ? Est-ce que … est-ce que ça fait longtemps ?

Puis elle répondit à sa question sur le « Parc », c’était ainsi qu’on nommait cet endroit dans leur langue. « Parc d’attraction ».

- Je crois qu’on peut dire ça. Les gens ici ont été très accueillant avec moi, ils m’ont offert une maison, un « mobil-home » ajouta-t-elle en anglais encore, mais plutôt hésitante sur la prononciation. Jane dit qu’ils veulent me protéger. Que ce monde peut être dangereux pour des gens différents…je crois qu’elle voulait dire, doués de magie. A ce sujet, vous pourriez peut-être m’aider. Je n’ai pas bien compris tout ce que ça voulait dire, de quel danger elle parle.

Oui parce qu’elle avait déjà assez à faire, de s’inquiéter de croiser la route de nergalii à chaque pas qu'elle faisait. Du reste elle ne manqua pas de lancer un coup d'oeil vers le reste du parc et ne fut qu'à moitié surprise de croiser le regard de Samuel. Ce dernier tourna alors les talons pour disparaître dans la foule.

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ft. Alan Hunt

Syragane sourit :

- Oh mais je sais nager, mais…je ne m’attendais pas à me retrouver soudain plongée dans une eau aussi froide ! Oh et votre adresse…. Elle hésita, je crois que je ne saurai pas la retrouver. J’ai encore beaucoup de mal à m’y retrouver dans cette immense cité. Alors je me limite le plus possible à ce parc.  Bien que Jane m’aide beaucoup. Elle me donne des conseils très précieux.

Quant à ses pouvoirs, il semblait encore plus incertain qu’elle à ce niveau, et ne lui donna aucune réponse très concluante, ce dont elle ne pouvait lui en tenir rigueur, il avait l’air tellement dans l’incompréhension. Alors elle se dit qu’il finirait par apprendre comme elle, avec l’avantage certain que lui était dans son kan, contrairement à elle. Mais ils avaient beaucoup à partager, ce qu’elle ajouta pour la peine :

- Au final, nous pourrions être utiles l’un à l’autre. Je sais des choses que vous ignorez et vous savez beaucoup de choses que j’ignore.

C’était peut-être pour ça que les dieux les avaient mis sur la route l’un de l’autre. Ce que lui appelait le destin. Mais son attention fut détournée par la présence de Samuel qu’elle remarqua avant de le perdre de vue dans la foule, présence qu’Alan remarqua lui aussi. Syragane le rassura.

- Oui, c’est Samuel, il est le …chef je crois de cette communauté en attendant que leur vrai chef se remette, il a été gravement blessé je crois. Et Samuel se méfie de moi. Mais je le comprends. Je me méfierai aussi à sa place.

Alan lui expliqua enfin dans cette langue qu’elle comprenait beaucoup mieux, pourquoi elle devait faire attention, parce que les hommes craignaient tout ce qui pouvait sortir de l’ordinaire. Le « surnaturel » comme il l’avait dit… Ainsi le comprit-elle alors oui c’était clair qu’avec ses pouvoirs naissants, elle allait devoir être discrète, dans la mesure du possible, ce qu’Alan releva. Elle sourit avec un haussement d’épaule.

- En effet, c’est le plus grand problème pour le moment.  Apprendre à contrôler…tout ça, dit-elle en faisant un geste plutôt vague de ses mains, la magie d’Enlil est grande et …..je ne suis au fond qu’une prêtresse d’Isthar.

Syragane soupira avant de reporter son attention sur Alan :

- Et vous ? Comment vous faites ? pour que la magie de Sîn ne vous échappe pas ?

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ft. Alan Hunt

L’idée la séduisit aussitôt, comme le prouva le sourire qui éclaira son visage.

- Ce serait avec grand plaisir ! Ce serait tellement plus facile, et… elle ajouta avec un sourire plus mutin. Plus agréable aussi naturellement.  

Et la grande prêtresse ne rechignait jamais à profiter d’une compagnie comme celle d’Alan. Il était si charmant et plein d’attentions.  Elle le regarda ensuite faire, n’osant pas lui proposer de tenir sa fille, pendant qu’il tentait vaillamment d’écrire sur son bout de papyrus. Un papyrus particulièrement fin et délicat qu’elle avait découvert avec Jane. Une autre de ses nombreuses découvertes ! Mais Alan s’était montré très protecteur avec Oniera dès leur première rencontre et elle se garda de faire une offre qu’il pourrait mal interpréter.

Quand il lui tendit le bout de papyrus, Syragane l’examina un instant, curieuse devant ces caractères qu’elle ne savait pas encore décrypter, mais qui était la même que Jane lui avait fait découvrir. C’était très différent de ce qu’elle connaissait, entre l’écriture cunéiforme des akkadiens et celle très déliées des arabes, celle-ci était…. Particulière, mais comme le remarqua Alan, elle trouverait sans nul doute de l’aide pour lui « téléphoner » si d’aventure, elle avait besoin de lui.

Enfin Alan lui expliqua pour ses pouvoirs et le récit de sa malheureuse expérience arracha un rire à Syragane qui s’excusa aussitôt.

- Désolée, je ne voulais pas me moquer, mais ça ne doit pas être simple pour vous non plus.

Puis il évoqua un sortilège qu’il avait voulu utiliser contre elle parce qu’il avait pris peur. Si Syragane fut surprise de l’apprendre, elle ne lui en tint aucunement rigueur.

- Alors elle avait vraiment…..disparu !

Elle sourit parce qu’elle s’était doutée du mensonge d’Alan mais qui aurait pu lui en vouloir ? Comme elle le lui dit :

- Je sais désormais que vous ne me voulez aucun mal. Et pour votre enfant, Syragane sourit à cette dernière, en jouant avec sa petite main si délicate.  Les enfants sont une grande bénédiction. Jamais je ne pourrai leur faire le moindre mal, soyez rassuré Alan. Et je n’en ferai pas non plus à l’homme qui m’a aidé ! Lui assura-t-elle avec ferveur et un grand sérieux, comme si elle lui prêtait là un serment, une façon de s’exprimer qui était naturelle pour elle, la grande prêtresse habituée aux cérémonies et aux grands discours pleins de verve et de passion.

Et elle conclut :

- Il est naturel d’avoir voulu la protéger. Je ne suis….elle hésita, je n’étais qu’une étrangère pour vous, mais je ne le suis plus n’est-ce pas ? Puis elle lui tendit sa main, comme on le lui avait montré ici, en lançant d’une voix douce et en anglais:

- Ami ?

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ft. Alan Hunt

Ailleurs ? La réponse la laissa perplexe, mais Syragane choisit de ne pas le bousculer par trop de questions sur le sujet. Et puis… il acceptait d’être son ami, il aurait tout le loisir de lui raconter, et à eux de se raconter qui ils étaient, ce qu’ils avaient fait et tant d’autres choses. C’état du baume au cœur pour Syragane, de savoir que même si on l’avait arrachée à ses racines, elle avait su retrouver ici des amis.

Elle avait bien sûr encore beaucoup de questions à poser mais Alan la devança en lui demandant si elle travaillait ici à présent. Il suggéra une réponse qui l’amusa :

- Oh non, ce n’est pas vraiment mon domaine. A vrai dire, mes occupations avant, enfin ce qui pourrait correspondre à un « travail » étaient très différentes que ce que je fais ici…. sauf en matière de distraire le roi , ou accomplir les rituels sacrés d’Isthar.

Syragane s’interrompit. Était-il bien utile de rappeler tout ça ? Elle soupira et reprit d’un ton plus posé :

- Samuel a voulu savoir ce que je pourrai faire pour ….amuser les gens, c’est leur travail ici, distraire le public, amuseurs, jongleurs, et Jane m’a expliqué que c’était habituel de trouver un rôle à chacun ici au sein du parc. Et donc c’est le mien désormais, en attendant qu’Isthar me guide.

Elle réalisa qu’elle ne lui avait pas dit en quoi consistait ce fameux rôle « d’amuseur ».  Elle l’observa, en concluant :

- Je danse… les danses sacrées, et autres danses de rituels. Vous appelez  ça «  danse du ventre. » Jane a dit que ça plairait beaucoup au public.  

Puis dans une inspiration soudaine, elle proposa avec le plus grand naturel :

- Je pourrai danser pour vous, si vous voulez.

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ft. Alan Hunt

Ça pour être différent ! Syragane afficha un sourire mi-figue mi-raisin. Enfin pour elle, ça n’était pas le pire, le plus difficile à appréhender en ce monde, plus que ce nouveau « travail », c’était plutôt toute cette évolution, des milliers d’années qui avaient transformé un monde qu’elle ne reconnaissait plus. Mais elle allait bien devoir s’y faire, parce que pour le moment, elle ne pensait même pas pouvoir retourner chez elle, et puis comme elle lui précisa :

- Mais je suis reconnaissante à Isthar de m’offrir ce travail et de nouveaux amis. C’est mieux que d’être chassée comme une paria, et de devoir mendier sa nourriture.

Quant à sa définition de la danse du ventre, Syragane le dévisagea partagée entre de l’amusement et de l’incompréhension.

- Aladin ? ….qui est-ce ? Un ami à vous ?

Oui après tout, Alan, Aladin, c’était plutôt proche. Elle sourit et l’assura :

- Ce genre de danse plait beaucoup aussi dans mon kan. Les jeune vierges l’apprennent dès leur plus tendre enfance, comme je l’ai appris, afin de plaire au roi et à ses sujets, et puis ça fait partie de nombreuses cérémonies, comme celle pour obtenir une plus grande fertilité. Conclut-elle avec un sourire.

A sa proposition, Alan accepta bien que Syragane vit que cela semblait l’avoir mis mal à l’aise. Pourtant c’était un honneur qu’elle lui faisait, de le choisir pour ses danses…. Mais peut-être que c’était pour ça qu’il était emprunté ? Quant au show et à cette histoire de scène, Syragane cilla, ayant oublié qu’ici, on ne dansait pas du tout pour les mêmes raisons. Les mœurs étaient si différentes. La danse était reléguée à un simple spectacle, un amusement. De la part de saltimbanques oui, mais pas de la part de la grande prêtresse. Enfin il fallait bien qu’elle s’adapte à son nouveau travail. Ici ça n’était plus elle qui choisissait ses danses et son public, mais Samuel et ce « travail » qu’il lui avait offert.

- Oh oui,… la « scène » , bien sûr. Et non pour le moment ils me laissent encore un peu de temps pour m’adapter, ne serait-ce que m’habituer à ces boîtes à musiques. Et ces sons si différents.

Syragane observa ensuite Alan coucher sa fille dans ce berceau sur roulettes, une invention très ingénieuse !

- Elle est fatiguée ! Comme je la comprends. Il y a beaucoup de bruit ici, on dirait le souk du jour sans lune. Tellement de gens qui viennent sur ces « attractions ». Jane voulait que j’essaie, mais ça non ! c’est trop me demander !

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L’appeler, c’était encore une notion qui lui était étrangère, même si Jane avait tenté de lui expliquer qu’il existait un moyen de le faire sans avoir à se déplacer. C’était formidable en fin de compte mais Syragane allait avoir besoin de temps pour comprendre comment tout ça fonctionnait, ces histoires d’onde et toute cette science, c’était tellement éloigné de ce qu’elle connaissait.
Mais elle en retint pour le moment le principal… il était prêt à l’aider si jamais ici, ça n’irait pas pour Syragane. Elle hocha la tête avec un sourire.

- Merci Alan, vous êtes vraiment adorable. Je vous dois déjà beaucoup.

Il lui expliqua ensuite en riant qui était cet Aladin, et Syragane eut un sourire un peu gêné. Encore quelque chose qui faisait partie de son immense ignorance et pour quelqu’un qui comme elle, avait bénéficié de savoirs qui n’était pas accessible à la plupart des femmes, c’était plus embarrassant encore !

- Oh je vois…

Enfin elle voyait plus ou moins, c’était encore quelque chose qui faisait partie du domaine de l’amusement. Elle se promit d’en parler plus tard avec Jane.
Quand Alan lui demanda pour les manèges, Syragane eut l’air un peu effrayée.

- Je ne sais pas trop à vrai dire, mais cela ne me tente pas vraiment. Et …ça a l’air très….effrayant, avoua-t-elle, il n’y a qu’à entendre comment les gens hurlent quand ils sont dedans. C’est très étrange, vouloir se faire peur de la sorte.

Quoique dans son Kan, les hommes aimaient à s’affronter dans des combats pouvant aller jusqu’à faire couler le sang, une manière de se distraire mais aussi de se prouver qu’ils étaient plus fort que l’autre. Que se prouvait-on quand on montait dans ces « engins » ? Qu’on était plus courageux qu’il n’y paraissait ?  Est-ce que ça voulait dire qu’elle, ne l’était pas ? Quand il lui dit que même Oniera y était « montée », Syragane afficha un air dépité….

- Dans ce cas, il faudrait que j’essaie …un jour, conclut-elle en soupirant. Surtout si c’était une façon de prouver son courage !

Mais elle oublia tout ça à la question soudaine d’Alan. Le téléphone ! Jane lui avait montré le sien, un petit objet étrange qui brillait un peu comme un miroir, et qui ressemblait beaucoup à sa tablette avec un tas de symboles lumineux et… bref , la réponse fut évidente. Elle secoua la tête avec un sourire..

- Non…. Je ne sais même pas si je serai capable de m’en servir, ça m’a l’air….. très compliqué. Dans mon Kan, nous envoyons…elle se corrigea. Nous envoyions des hommes pour transmettre nos messages. Des enfants parfois quand ça ne dépassait pas la cité. Mais à l’extérieur, il leur fallait au moins un bon cheval.

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ft. Alan Hunt

Elle hocha la tête. Oui … elle essayerait, les petits éléphants de couleurs peut-être ? Oh allez elle pouvait bien tenter la roue, ça n’allait pas trop vite.

- Avec vous, alors, suggéra-t-elle. Vous saurez peut-être me transmettre un peu de votre courage, ajouta-t-elle en riant parce qu’elle devait paraître bien peureuse à ses yeux.

Puis il lui demanda pour le téléphone et Syragane lui expliqua enfin tenta d’expliquer à quel point cet objet semblait compliqué à ses yeux. Et l’histoire des messagers à chevaux amusa beaucoup Alan qui lui expliqua qu’aujourd’hui les messagers n’étaient plus utiles parce qu’un petit objet brillant les avait remplacés et qu’en plus les destinataires recevaient leurs messages instantanément. Que pouvait-elle dire à ça ? Il n’y avait pas de comparaison possible.

Tout ça la laissait fort songeuse quand Alan lui proposa d’aller acheter un téléphone ensemble. Même qu’il offrit en prime, de lui apprendre à s’en servir. Syragane le dévisagea, surprise, et en même temps très touchée par autant de générosité. Alors elle ne sut pas si c’était l’idée de passer plus de temps avec cet homme surprenant qui la décida à accepter son offre, ou la simple envie de découvrir tout ça….avec l’aide d’Alan, mais toujours est-il qu’elle accepta.

Son regard brilla avec plus d’intensité, et elle acquiesça sans le quitter des yeux.

- D’accord ! Avec plaisir Alan ! Demain après …midi.

Bon à présent il devait s’en aller et Syragane ne voulut pas le retenir plus longtemps. Toutefois elle voulait le remercier d’une façon ou d’une autre. Alors elle se pencha pour embrasser sa joue, un baiser doux et délicat, avant de s’écarter, se noyant un instant dans ses beaux yeux verts.

- Merci….je suis très contente d’avoir croisé votre chemin à nouveau…. Et… je me réjouis pour demain. Qu’Ishtar accompagne vos pas, conclut-elle avec un sourire.
Elle se pencha pour effleurer la joue de la fillette, puis les laissa s’éloigner avant de revenir elle-même à son propre Mobil-home, Jane allait s’inquiéter.