Tony Mordoh

Casier judiciaire : non

Si oui, pour quels faits : (listing des condamnations)

Recensement par le SPN : non

Description du contact avec le SPN :

Contact avec un chasseur de surnaturel (hors SPN) : non

Description du contact :(relatez ici le contact de votre personnage avec les chasseurs de surnaturels).  

Les glaçons tintent dans mon verre comme des notes d'une triste partition. Mon humeur est au plus bas et l'alcool ne semble pas m'aider.

J'ai beau fixer les cercles humides laissés sur la table en bois, les mêmes images me hantent inlassablement.

Son visage blême, figé dans une expression d'horreur, me revient en mémoire tel un uppercut en pleine tête. Je peux encore sentir l'odeur du sang mélangée avec celui iodé de la mer tandis que le ressac répand son chant lugubre.

Le jeune homme allongé à mes pieds n'est autre que mon petit ami.

La douleur étreint mon cœur qui tambourine en un rythme frénétique. Mes genoux cèdent et se fracassent contre le sable. Les premières perles salées ne tardent pas à inonder mes joues devant l'atroce réalité.

Autour, le décor est magnifique. Nous sommes sur une plage d'une des plus belles îles du monde. La mer nous tend les bras alors que le soleil drape l'horizon de ses doux rayons. Comment une telle tragédie a pu se dérouler dans ce paysage paradisiaque ? Pourquoi ?

En vérité, je le sais.

Tout cela est ma faute, j'en suis totalement responsable. Le savoir ne fait qu'approfondir un peu plus la blessure au fond de moi.

Je me mords les lèvres pour m'ancrer au présent. Cela fonctionne, je me retrouve de nouveau dans ce bar New-yorkais. C'est loin d'être le lieu le plus chic, avec ses vieux tabourets et ses tables égratignées, mais au moins, la musique y est agréable.

Assise au fond de la pièce, personne ne fait attention à moi. C'est tant mieux. Je n'aime pas la compagnie. Ou plutôt, je ne l'aime plus.

J'expire lentement pour effacer les derniers miasmes de souvenir remontant à deux années maintenant.

Le liquide ambré m’appelle et sans hésitation, je prends une nouvelle gorgée. L'alcool me réchauffe le gosier, diffusant un sentiment de bien-être. Malheureusement, celui-ci ne dure qu'une demi-seconde pour être aussitôt remplacé par le poids de l'affliction.

Je ne suis pas une alcoolique malgré les apparences. Seulement ce soir, c'est plus difficile. Tout me paraît plus sombre comme si le monde allait bientôt s’effondrer. Tant mieux si c'est le cas. Je n'ai, de toute façon, plus rien à perdre.

Je suis interrompue dans mes réflexions par le téléphone qui vibre dans ma poche. Je fronce des sourcils et m'empare de l'objet. Mon regard se pose sur l'écran tactile pour constater que ma mère tente de m’appeler. Je ne décroche pas. À la place, j’éteins l'appareil et le remets dans ma poche.  

Cela fait longtemps que je n'ai pas vu mes parents. De plus, on ne peut pas dire que la Floride soit la porte d'à côté. Notre récente séparation n'est pourtant pas due à une mauvaise entente, mais plutôt à ce sentiment d'étouffement que je ressens en leur présence. Là-bas, tout me rappelle ce que je suis, ce que j'ai fait.

Et surtout, les raisons qui ont conduit mon petit ami à se jeter d'une falaise lors d'un voyage d'été.

- Eh bien ma jolie, que fais-tu toute seule ? s'exclame brusquement une voix nasillarde.

Je lève la tête pour découvrir un homme d'une trentaine d'années s'installer juste en face de moi. Il sourit de toutes ses dents, sûr de son charme sur la pauvre jeune fille que je suis. Il est loin d'être laid avec ses petites mèches brunes et son regard cobalt. Cependant, sa beauté ne m’atteint pas.

Son attitude transpire la confiance et bientôt, il croise ses longues jambes pour prendre ses aises. Pourtant, derrière cette nonchalance, je ressens son envie de reconnaissance de la part des autres. Tout au fond de lui, la frustration le ronge de ne pas être une de ces célébrités que l'on voit à la télévision.

- Tu as perdu ta langue ?

Ma seule réponse est un regard noir qu'il ignore superbement.

- Oh, je vois, tu es une timide.

Si seulement il savait, son sourire aurait depuis longtemps disparu.

La mélopée dans ma tête se fait plus intense et mes doigts commencent à pianoter sur le bois de la table. L'envie de chanter me tire une grimace.

- Je ne suis pas intéressée, murmuré-je finalement.

- Quoi ? J'ai pas entendu c'que t'as dit !

Un pli creuse un peu plus mon front et je comprends que c'est le genre d'homme qui n'accepte pas un refus. Il sait parfaitement que son comportement me dérange, mais cela ne l'empêche pas de continuer son petit numéro de séducteur.

Ainsi, au lieu de continuer à subir sa danse du paon, je rassemble mes affaires et me lève. Je reste indifférente aux remarques désobligeantes de l'inopportun et laisse un pourboire au serveur avant de partir.

Mieux vaut ça, plutôt que le corps désarticulé d'un homme qui ne se relèvera plus.

Validation